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Gilets jaunes et la banalisation du mal

Selon Hanna Arendt (politologue et philosophe), dans ses études sur la banalisation du mal :

  • La banalité : ce terme indique aussi que le mal est partout dans la société. Toute une société se met, de façon commune, à accepter une étiquette morale sans entretenir de réflexion à son sujet. La société adhère à un système normatif et cesse de comprendre son contenu. Puis, sous diverses pressions, ce contenu évolue sans que l’adhésion au système normatif ne change, pouvant même devenir l’inverse de ce qu’il était : “tu tueras ton prochain”pour le IIIe Reich, ou “tu porteras de faux témoignages contre ton prochain” pour l’URSS sous Staline. Cette évolution peut se produire très brutalement : en une nuit, dit Hannah Arendt, et il ne reste plus que l’habitude de tenir fermement à quelque chose. Hannah Arendt a montré pourquoi la pensée humaine, la réflexion, l’analyse critique étaient un rempart contre le totalitarisme.
  • On retrouve dans l’organisation de l’univers concentrationnaire Soviétique des années 1930 et 1940, sous Staline, les éléments qui rendent banals les gestes des bourreaux en les rendant les plus conformes à la légalité, à la défense des valeurs soviétiques, en utilisant un vocabulaire consacré et spécifique pour qualifier leurs actions, en organisant et en réglant tout comme papier à musiquede telle manière que le bourreau se sente à l’aise dans son rôle.
  • En phase avec les remarques de Victor Klemperer sur le développement des stéréotypes en milieu nazi, Hannah Arendt montre que l’usage des clichés de langage diminuent la conscience des actes. Ces expressions toutes faites, utilisées mécaniquement, empêchent l’imagination, elles entrainent une incapacité à être affecté par ce que l’on fait et, la personne se drapant dans un aspect banal, entretiennent l’absence de pensée.

Sans porter de jugement de valeur sur le mouvement de « Gilets Jaunes » on observe, dans ce mouvement spontané, de nombreux éléments qui nous ramènent à l’analyse d’Hanna Arendt.

  • On y retrouve l’ensemble des éléments présent dans les manifestation traditionnelles comme par exemple :
  1. Le rassemblement d’un certain nombre de courants d’opinions différentes contre une cible commune (comme discréditer ou abattre un gouvernement). Dans le mouvement des « Gilets Jaunes » on retrouve en dénominateur commun la réaction contre le « gouvernement Macron » soit parmi les manifestant soit dans les groupes d’opposants politiques. Ce rassemblement « contre » est assez fréquent, mais il explose dès qu’il s’agit de faire des propositions positives et que l’on commence à entrer dans le « pour ». Les divergences idéologiques s’affirment et le mouvement se scinde en groupes opposés.
  2. L’usage dans ces manifestation de slogans stéréotypés (Macron démission, à bas le capitalisme, écoutons la voix du peuple) deviennent des clichés de langage qui se propagent et dépassent la valeur de leurs contenus. Quand une foule scande ces slogans sa réflexion est comme anesthésiée et ceux-ci deviennent comme un rituel auquel on s’accroche mais dont on a perdu le sens. Les valeurs sous-jacentes peuvent alors évoluer sans que les participants au mouvement n’en prennent conscience. Ils continuent à adhérer au symbole sans se rendre compte que les valeurs qu’il véhicule ont largement dérapés. C’est bien sûr un point d’inquiétude car des leaders peuvent entrainer une foule dans une direction qu’elle ne souhaitais pas.
  • Mais d’autres point, plus spécifiques au mouvement des « gilets Jaunes » doivent nous alerter
  1. Ce mouvement s ‘inscrit dans un cycle plus général de contestation par « le peuple » de tous les corps constitués (Présidence, gouvernement, partis politiques, syndicats, élus locaux) qui constituent le tissus même de notre structure sociale et politique. Hors ces représentants il n’existe rien, ni société, ni gouvernance, ni vie collective. Malheureusement ce « peuple » ne propose rien en remplacement et la rage de détruire (alimentée par le sentiment d’impuissance à intervenir dans son destin) l’emporte sur toute conception d’une future organisation.
  2. Le point le plus inquiétant réside dans ce qu’Hanna Arendt à défini comme la banalisation du mal. Au cours de ces trois semaines de manifestations nous avons assisté à des comportements de plus en plus violents des participants aux manifestations sans que l’opinion ne se dessaisisse de son soutien au mouvement. Ceci signifie que l’inacceptable recule et que les comportements violents deviennent acceptés pour peu qu’ils concourent à l’objectif choisi, même si celui-ci est devenu slogan et à largement dévié de son but initial.
  3. La conjonction de ces deux points est la porte ouverte (très largement) à la mise en place d’un système anarchique, et pour peu qu’un leader charismatique (je devrai dire Christique) survienne il pourra facilement en faire un système totalitaire. Contre sa volonté profonde « le peuple » a consenti à passer de la démocratie à la dictature sans même s’en apercevoir. C’est le schéma d’installation du régime Nazi en Allemagne dont « le peuple » ne s’est rendu compte qu’après la défaite.

Les mouvements que nous vivons actuellement sont des plus inquiétants, le rejet (bien souvent mérité) des élites remplace la réflexion par le sentiment, le cognitif par l’émotif, le progressif par le régressif. Gardons-nous de cette vision « animale » de la société car la loi de la jungle ne profite qu’aux plus forts.

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