skip to Main Content
1-800-987-654 admin@totalwptheme.com

Jusqu’alors, mes responsabilités professionnelles avaient été essentiellement celles d’un gestionnaire : Administration, Finances, Secrétariat Général, Personnel etc. De par le poste que j’occupe à Grasse, je vais devoir élargir le champ de mes «compétences», et m’ouvrir à des activités plus commerciales dans le double domaine des Achats et des Ventes.

Achats
L’expérience aidant, je dirai souvent à mes collaborateurs:

« Le coût Matières étant un élément constitutif important du Prix de revient de nos produits, la marge commence à l’Achat. Vigilant sur la qualité, dur négociateur sur le Prix».

Je prends mon bâton de pèlerin et, souvent accompagné d’un technicien, commence à visiter les fournisseurs de produits qui «pèsent» lourd, souvent d’origine exotique comme:

– Essence et Concrète de Rose: Turquie, Maroc, Bulgarie, Russie

– Concrète Jasmin: Egypte, Maroc, Italie, Inde

– Essences de Citron, Bergamote, Orange, Mandarine en Calabre et Sicile

– Gomme de Galbanum : Iran

. – Essence de Patchouli : Indonésie – Concrète de Tubéreuse: Inde

– Rhizomes d’Iris: Italie, Maroc Et bien d’autres.

J’ai toujours aimé aller sur le terrain, visiter les producteurs, les paysans.

Ventes

Selon la règle du partage du monde entre les deux frères Amic, Grasse était alors responsable (de mémoire) :

– France Province, Allemagne, Scandinavie qui vont rapidement passer sous le contrôle du «Dépôt de Paris»
– Espagne et Portugal

-Italie

– Grèce

– Turquie

– Europe Centrale et Russie

– Afrique du Nord et Afrique noire francophone

– Egypte et Moyen-Orient

-Inde

– Asie du Sud-Est

– Japon et Corée du Sud (sous la responsabilité, encore quelque temps, de Pierre Blaizot avant d’être «récupérés» par Jean Amic)

Je ne vais pas, bien sûr, détailler mes activités sur tous ces secteurs commerciaux, mais plutôt retenir ceux où je me suis plus particulièrement investi, très aidé par mes collaborateurs et amis.

Italie
Où nous disposons d’une filiale à Milan avec salle de mélange.Je rappellerai René Roux (dit «Tonton»), allié à une vieille dynastie Grasso- Ricordienne, à la voix un peu chevrotante, mais connaissant bien les ficelles du métier. Mais aussi Piero Fenaroli, un excellent ami, mais hélas ! une des grandes déceptions de ma vie professionnelle. Il a honteusement trahi ma confiance en s’abandonnant à un trafic de formules et d’informations commerciales.

Côté clients, je garde un excellent souvenir de mes relations avec les Vidal, grande famille vénitienne. Sans oublier, à Florence, le Marchese Pucci dont l’adresse était, en toute simplicité : Palazzo Pucci, Via de Pucci, FIRENZE

Espagne

J’ai évoqué la situation de crise que je trouve à mon arrivée à Grasse, crise liée au départ à la concurrence de plusieurs parfumeurs/commerciaux. En particulier, Marcel, le fils de Jean Carles, parfumeur historique de la Maison Roure et auteur de la Méthode qui porte son nom, base pédagogique de l’Ecole de Parfumerie.

De père en fils, les Carles étaient très actifs sur les marchés espagnols (et portugais) et il a fallu rapidement reprendre le flambeau.

Nous couvrions le marché via un agent à Barcelone et un autre à Madrid.

À Barcelone, nos agents, père et fils, Garcia Perez dei Ingerto y Garriga (n’en jetez plus !), d’origine andalouse, mais devenus très catalans, quoique très franquistes, ce qui n’était pas le cas de la plupart de nos clients de Barcelone, farouchement nationalistes. Sans oublier la fidèle Conchita Garces Moles, pilier de l’agence10..

À Madrid, Arturo Cabestrero dont un neveu dirigeait notre filiale en Argentine.

Le marché espagnol est, traditionnellement, un marché important pour la Parfumerie et la Savonnerie. Les grands noms étaient alors (et le sont toujours) : Puig, Myrurgia (Famille Monegal), Gal (Famille Echandia), Segura etc. J’avais des relations très amicales avec le Management de Puig et nous avons reçu à Grasse, pendant les vacances d’été, le fils de Tony Puig (à la demande de Louis Amic), puis, comme nous avions reçu le fils du Patron, le fils de Paco Serra (Directeur Technique) et celui de Luis Castells (Directeur des Achats). Peut-être cela facilitait-il les discussions annuelles, en particulier sur les contrats de «Lavande» .

La plupart de ces amis catalans m’appelaient « Paco».

J’ai commencé à m’initier au castillan (Méthode Assimil), mais le problème, à Barcelone, était que mes clients parlaient tous un français partait ou le catalan. J’étais pratiquement «interdit» de castillan, que je n’ai pu approfondir, plus tard, qu’en Amérique Latine.

À noter, qu’à l’époque, je m’étais entiché de deux savons:

– Maja, de Myrurgia

– Heno de Pravia, de Gal
dont nous fournissions les concentrés, type Fougère. Eh bien, quarante ans après, ces savons sont toujours sur le marché. Je les ai retrouvés, pour Heno de Pravia, au Costa Rica, en 2U014, fabriqué au Mexique (la mondialisation … ), mais

10 Spécialiste de « L’etiqua verde » aussi en 2015, à la Maison d’Espagne d’Aix en Provence qui distribue également le savon Maja. Que de souvenirs olfactifs!

Portugal
Nos agents à Lisbonne Je débarque à l’aéroport de Lisbonne en hiver. Il fait froid et humide. Je suis accueilli par deux vieillards d’âge plus que canonique. Ce sont nos agents! Ils m’emmènent immédiatement au restaurant me rassasier de bacalhau traditionnelle et boire du Vinho Verde. Le restaurant n’est pas chauffé et nos agents restent emmitouflés dans leur pardessus, chapeau sur la tête. Ça commence bien ! Nous sommes encore en pleine période Salazar ( la Révolution des Œillets viendra quelques années plus tard), le pays est pauvre et nos agents gagnent peu.
Devant cette peu brillante situation, il me faut prendre quelque décision, après mûre réflexion. C’est triste, mais le plus âgé décède assez vite (est-ce ma visite qui l’a terrorisé ?).

En ce qui concerne « le plus jeune» (il s’appelait Costa, comme beaucoup de Portugais et devait avoir + ou – 80 ans), je lui propose une petite rente annuelle, genre retraite, pensant que cela n’allait pas obérer les finances de la Compagnie. Il accepte. À une condition, c’est qu’après son décès, cette rente soit réversible sur sa sœur, plus âgée que lui et handicapée. J’accepte, bien sûr, n’imaginant pas faire courir grand risque à notre tiroir-caisse. Le brave Mr Costa a le bon goût (si je puis dire) de ne pas bénéficier bien longtemps de mes libéralités. Par contre, sa soeur va se maintenir en vie d’assez longues années.

Je me revois, sous l’œil courroucé du comptable de Grasse, signer, chaque trimestre, le virement (oh! combien modeste) de la pension de l’héritière.

J’avais quand même demandé au nouvel agent que j’avais appointé de vérifier régulièrement l’état de santé de la vieille dame.

Et, deux, trois fois par an, il me disait, navré: «Elle va très bien» …

 

Obélix

Mais qui était ce nouvel agent portugais?

C’était Obelix, alias Mario de Almeida. Même format en long et en large, mais d’une grande agilité mentale et physique. Mario de Almeida ! Un phénomène. Excellent vendeur, jovial, très astucieux, il nous a sauvé la mise sur le marché portugais.
Fidèlement, tous les 31 Décembre, vers Oh30, Mario nous appelait à Grasse pour nous souhaiter la Bonne Année. Moins bon souvenir du jour où il m’encouragea à goûter les huitres «Pied de cheval» chaudes… L’essai ne fut pas du tout concluant. Heureux temps! Mais, comme beaucoup, j’y reviendrai plus loin, nous avons dû nous séparer de Mario, au moment de la fusion.

J’ai encore dans l’oreille (et dans le cœur) ses appels téléphoniques : il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Il n’avait pas démérité, mais les exigences du «Grand Capital», comme disait G. Marchais, faisaient qu’il devait s’en aller. Il y en a eu beaucoup d’autres, hélas!

Un Seigneur féodal portugai J’allais régulièrement visiter un important client à Porto. Immense propriété: Palacio – Fabrica – Casa por empregados Repas solennel. Nous sommes deux. Lui, à un bout d’une très longue table, et moi, à l’autre bout. Bref, nous devisons aimablement. Je le questionne :

« J’ai remarqué que les logements destinés au Personnel de service sont de bonne qualité, mais équipés de fenêtres toutes en hauteur. Pourquoi ?»

-« C’est pour que les domestiques ne puissent pas m’observer quand je me promène dans mon parc.»

Une fois de plus, nous sommes encore sous le régime de Salazar.

Une aide efficace

Avant de clore ce chapitre hispano-lusitanien, je ne saurais manquer de saluer Claude Debiève qui m’a utilement relayé sur ces deux marchés.

Claude, parfaitement trilingue (français – espagnol – portugais/brésilien) a commencé sa carrière chez Roure au Brésil, sur les traces de son oncle.

Nous avons pensé à le «rapatrier» en Europe pour prendre en charge les marchés espagnol et portugais.

Ce qu’il a fait avec beaucoup de mérite et je l’en remercie.

Europe Centrale

Yougoslavie – Pologne – Bulgarie – Roumanie – D.D.R. – Tchécoslovaquie – Hongrie – Albanie.

Nous sommes en plein glacis soviétique. Tous ces pays sont sous le double joug du communisme et de l’U.R.S.S.

Robert Cassio est en charge de ces marchés, économiquement, financièrement et politiquement difficiles.

Il y fait preuve d’une grande patience et d’une rare habileté doublée d’un sens aigu de la combine. C’est aussi le roi de !a compensation : vente de parfums contre achat de produits locaux. Il nous a même, une année, quasiment obligés à acheter des sacs poubelles en Roumanie, au grand dam de Mr Honoré Cotta, le responsable Achats de l’époque.

Je fais plusieurs voyages avec lui et nous établissons, entre nous, tout un langage codé: le Tondu, le Gros, le Petit Grenier etc.

Il était également responsable de l’Autriche, de la Suisse et d’Israël, territoires où je ne l’ai pas accompagné, à l’exception de la Suisse, bien sûr, mais pour des raisons autres que strictement commerciales.

Un autre nom de code: Monsieur Jean.

Russie
Nombreuses réunions:
– à Moscou, dans le cadre du clearing russo-égyptien : parfums contre matériel militaire.

– à Bakhtchissaraï, en Crimée, interminables discussions pour la mise au point d’un partenariat pour la production d’essence et de concrète de rose. Partenariat qui n’a jamais abouti bien que nous soyons arrivés à un agreement technique et commercial. Mais, à la dernière minute, il y a eu le Niet de la représentante du Parti Communiste à l’Usine, qui était la vraie Patronne, mais dans la coulisse.

– Même expérience décevante à Kichinev (Moldavie) avec Gilbert Tournaire, lui, pour du matériel d’extraction.

Afrique du Nord

De nombreux voyages au Maroc, mais plus pour acheter que pour vendre: jasmin – rose – fleur d’oranger – armoise – racines d’iris.

Une tentative de partenariat sans réel succès avec l’Algérie socialiste, en compagnie de Jean- Pierre Mayenc.

Plusieurs visites en Tunisie où nos affaires étaient très correctement défendues par un agent, d’origine Israélite, assisté d’un jeune Arabe dynamique (Louhichi).
Heureux pays que la Tunisie multiculturaliste de l’époque.

Turquie

J’y voyage surtout à la saison des roses. En effet, Roure est lié par un accord d’exclusivité avec Robertet pour l’essence et la concrète Rose turque.

L’usine de Robertet est située à Keçiborlu, dans la région d’lsparta. J’y suis accompagné par «Jojo» Guichard (père de notre parfumeur Jean).

Un mauvais souvenir: la soupe de tripes, spécialité locale!
Nous sommes représentés à Istambul et à Izmir et Paul Cassio va prendre le relais.

Egypte
Marché doublement important:
– Achats: principalement concrète Jasmin et concrète Cassie
– Ventes: dans le cadre du clearing russo-égyptien évoqué ci-dessus Un agent exceptionnel : Neguib Gannagé

Notre principal client: Kato Aromatics (du nom des deux Associés KamelfTounsi)
Nos interlocuteurs: Docteur Kamel et son Directeur, Mohammed Osman.
Mohammed est devenu un ami. Sa famille (son épouse et ses deux filles) nous accueille chaleureusement à leur domicile, Agnès et moi, à l’occasion d’un de nos voyages en Egypte. Où réside, d’ailleurs, au Caire, un de mes cousins germains, Bernard Weymuller, Directeur d’une importante Entreprise agro-alimentaire franco- égyptienne, parfaitement arabophone.

Moyen-Orient Syrie et Liban

Je suis introduit sur ces marchés par un personnage mythique de Roure, Robert Venel qui avait, ou avait eu, la responsabilité d’un immense territoire qui devait aller de l’est de Grasse à la frontière chinoise et de Cannes-La Bocca à l’Equateur. Il était sur le point de prendre sa retraite et ce fut son dernier voyage. C’était à la fin de l’hiver et nous avons été pris par la neige dans la traversée de l’Anti-Liban, entre Damas et Beyrouth. Il a pris froid, est rentré à Grasse, a dû s’aliter, atteint d’une pleurésie dont il ne se remit pas.

Liban
Très francophile et francophone. Petit marché très agréable, mais assez relax .

• J’ai eu la chance de pouvoir visiter longuement le site de Baalbeck, encore intact à cette époque.

Syrie.

Dominée déjà par la famille Hassad et le Parti Baas.

Les fabriques de savon, nos principaux clients «potentiels», sont sous le contrôle des militaires et les discussions techniques et commerciales se résument le plus souvent au calcul de bakchichs lié à une très éventuelle commande. Ce n’était pas les seuls et dans le monde entier …

Notre agent, Mr H.H.Joseph est un être aimable, souriant, flanqué d’une épouse et d’une belle- sœur, redoutables mégères, mais bonnes pâtissières. Je repartais en France, toujours lesté de pâtisseries orientales, malheureusement très chargées en graisse de mouton. Quand nous rentrions le soir, après la tournée de clientèle, les deux harpies tombaient sur le dos du pauvre Joseph, lui criaient dessus:

– «Alors Joseph, vous avez fait de bonnes affaires avec Monsieur le Directeur ?» Les commissions étaient à la clé !

Les infrastructures hôtelières de Damas n’étaient pas au top (Hôtel Semiramis !) et les Hachhach, de confession chrétienne, me logeaient dans un couvent de Religieuses. Pas dans n’importe quelle chambre. Non! Mais bien dans la chambre réservée à l’Evêque, quand il venait visiter les Bonnes Sœurs. Ces braves femmes étaient aux petits soins pour moi: petit déjeuner copieux, linge entretenu, y compris petites culottes et chaussettes, souliers cirés. Un vrai coq en pâte.

J’ai eu l’occasion, en plus de Damas, de visiter Alep, Homs, Hama et surtout l’inoubliable capitale de la Reine Zénobie: Palmyre.

Tous ces lieux, aujourd’hui (février 2016), n’évoquent, hélas!, que ruines et deuils. Peut-on encore, paisiblement, aller fumer le narghilé dans les cafés dominant la ville de Damas et la vallée du Barada ?

Paul Cassio, frère de Robert, a ensuite pris le relais et a dû se pencher sur les problèmes urinaires de la belle-sœur de Mr Joseph.

lrak.
Je n’en connais que l’aéroport de Bagdad, pour un rendez-vous d’affaires.

Iran

Surtout visité pour les achats de gomme de Galbanum.

Souvenir éblouissant des Mosquées de Téhéran et d’Ispahan, des tapis persans foulés aux pieds dans les escaliers du Bazar (pour les patiner) et des bidons de gomme de Galbanum dans des coins, moins éblouissants, du même Bazar.
Téhéran, au cœur d’énormes montagnes ocres et grises…Et puis, ce n’était pas encore le temps des Ayatollahs, ni des Mollahs.

Nous appointons un nouvel agent : Rezah Dadras. Très dynamique, il va remarquablement développer le marché, mais a dû se résigner à s’exiler en France, en raison de la situation politique du pays.

Inde

Roure y était actionnaire d’une Société de productions aromatiques de synthèse : «Industrial Perfumes» à Bombay.

L’usine n’était pas un modèle de technologie avancée (Je l’avais surnommée : l’Usine à la Dubout) et la sécurité inquiétait beaucoup nos actionnaires bâlois (cf. Bophal et Seveso).

En dehors du Directeur, corrompu, il y avait, heureusement, un Directeur Adjoint de grande qualité: Michael Carlos.

Nous allons nous employer à convaincre Michael de rejoindre Roure. Ce qu’il fit, avec le succès que nous savons, puisque, des années plus tard, après la fusion Givaudan / Roure, il occupera le poste de Directeur de la Division Perfumes.

Je reviendrai ultérieurement sur le rôle important de Michael dans l’évolution de Roure.

À notre époque grassoise, nous accueillons à l’Ecole de Parfumerie, trois stagiaires indiens.

– Dilip, le fils du corrompu, gras à lard, peu sympathique et doué pour pas grand-chose. – Vijay et Harun, les deux fils de notre agent à Bangalore, les frères Krishnamurty. Garçons d’une parfaite éducation, très ouverts au monde occidental, ils s’adaptent rapidement à la vie grassoise. Nous lierons avec eux une réelle amitié qui trouvera sa consécration lors d’une visite que nous ferons, Agnès et moi, à Bangalore, dans la famille de nos deux jeunes  parfumeurs stagiaires.

Pakistan
Une courte visite en compagnie de Guy Petit limitée à Karachi.

Bangladesh
Dacca, la pire agglomération urbaine que j’ai connue.

Sri Lanka

Soeb et Dolly Galely , nos très chers amis cinghalais (quoique Dolly soit d’origine indienne). Le père de Soeb est l’agent de Roure à Colombo, mais envisage de laisser la place à son fils. Je profite de l’opportunité pour élargir les responsabilités de Soeb (après un stage de plusieurs mois à Grasse) au sous-continent indien : Inde – Pakistan – Bangladesh.

Nous aurons, quelques années plus tard, le plaisir de faire avec les Galely un voyage touristique passionnant dans cette grande Île magnifique.
Malheureusement, Soeb décède brusquement d’une crise cardiaque (malgré son «evening banana»). Dolly reprend l’agence du Sri Lanka, mais je suis obligé de me séparer d’elle au moment de la fusion (elle a deux enfants). Elle n’a pas compris pourquoi et, je le crains, m’en a beaucoup voulu. Comme bien d’autres.

Asie du Sud-Est

Trois pays retiennent alors mon attention. Je les visite avec Jean-Louis Cabrier, responsable du secteur.

– Viet Nam

Un excellent agent, Nhnon, sino-cambodgien, basé à Cholon, le quartier chinois de Saïgon. Gros marché d’essence de Menthe pour la marque la plus connue de pâte dentifrice. Achat d’essence de Badiane (ou anis étoilé)et de Musc Tonkin.

Ma dernière visite : les Américains quittent le Viet Nam et notre agent doit s’exiler en Californie.

Je n’y retournerai qu’en 2015, plein d’admiration pour ce peuple exceptionnel.

Malaysia

Souvenir du rusé et malhonnête chinois, Tsai Wah, qui nous laisse une belle ardoise: marchandises stockées dans son dépôt et jamais payéesMais surtout nombreuses fabriques de Joss sticks, bâtons parfumés pour rituels religieux. Fabriques que nous allons visiter en traversant d’immenses forêts d’hévéas.

C’est à Kuala Lumpur que j’ai apprécié, pour la première fois, les petits restaurants de rues, à l’excellent rapport qualité / prix.

Indonésie
L’inénarrable Miss Yo et sa curieuse technique de transfert de Dollars U.S.
D’origine chinoise, elle avait été obligée d’ «lndoniser- son nom, lors des pogroms antichinois. Seule activité culturelle: visite au Temple de Borobudur.

Chine
Mon premier voyage en Chine doit dater des années 72 /73.

Objectif: la Foire de Canton qui était alors la seule possibilité de contact avec les Centrales d’Achat (nos produits étaient rattachés à l’Industrie Chimique).

On part de Hong Kong par le train capitaliste qui traverse les New Territories pour arriver à la frontière du Mainland, marquée par une rivière que l’on traverse sur un pont, à pied, en portant les valises pleines d’échantillons. On arrive alors au poste de Police / Douane.

Là, trois files :

1 -Les Occidentaux: Américains, Européens, etc.

2 – Les Chinois de H. K. qui vont rendre visite à leur famille, «de l’autre côté», encombrés d’énormes paquets.

3 – Les ressortissants des pays frères: Russes, Polonais, Allemands de l’Est.

On nous installe (au moins pour le groupe 1), dans un salon confortable, avec larges fauteuils, équipés, à la tête, de dentelle blanche, avec, à côté, l’inévitable crachoir. Ce sont alors les formalités de Police et de Douane.

Assez faciles pour le groupe 1, à condition d’avoir le bon Passeport et le bon Visa.
En effet, si, durant le même voyage, vous visitez Taïwan, il vous faut deux passeports : un pour la Chine continentale communiste, l’autre pour la Chine insulaire nationaliste. Par contre, plus difficiles pour le groupe 2, en raison d’un contrôle minutieux des marchandises importées. Enfin, et c’est paradoxal, interminables palabres pour les ressortissants des Pays Frères. Frères de qui? de l’URSS, bien sûr. Et c’est là où le bât blesse, car les rapports entre les deux Superpuissances commençaient à sérieusement se détériorer.

Libérés des contraintes administratives, nous montons dans le train communiste en direction de Canton.

Moment de grande émotion. Je suis en Chine ! Ce qui était encore assez peu fréquent à l’époque. Paysage très extrême-oriental, tel qu’on l’imagine dans les livres d’images pour enfants : dans une rizière, un paysan, jambes nues, chapeau conique sur la tête, pousse sa charrue attelée d’un buffle11. La première agglomération traversée est SHEN SHEN. C’est une zone agricole et maraichère. Shen Shen est le potager de Hong Kong. Tellement encore agricole que, 2 / 3 ans plus tard, j’ai engagé des négociations avec la municipalité pour organiser des plantations de jasmin et une unité de production de concrète. Avec, à vrai dire, un modeste succès. Bien des années plus tard, même scène au Yunnan. Mais le paysan a le portable à l’oreille.

Eh bien  aujourd’hui Shen Shen, + ou – 10 millions d’habitants, est un des plus grands «Ateliers du Monde» chinois. Bon, d’accord, il s’est écoulé plus de 40 ans depuis ma première visite en Chine. Ne jouons pas les Anciens Combattants. Mais, quand même, quel bouleversement dans ce monde …

Expérience intéressante à la Foire de Canton. Premiers contacts avec les «Marchands chinois», redoutables bargainers. Discussions accompagnées de flots de thé et de monceaux de cigarettes. Petit à petit, nous améliorons notre business. Mais le pays est encore très pauvre.
Il nous faut autant acheter que vendre et bien démêler la hiérarchie apparente de la hiérarchie réelle. Le confort hôtelier est des plus spartiates. Nous logeons dans des dortoirs de 6 /8 lits, plus quelques matelas par terre et devons nous rendre au réfectoire à des horaires précis, fixés en fonction de la nationalité. Je garde le souvenir de ma première balade dans la ville, en fin de journée. En costume / cravate à l’occidentale, alors que règne le bleu de chauffe chez nos amis chinois. Ceux-ci sont, en particulier, fascinés par nos cravates, quasiment inconnues pour la plupart d’entre eux. Et je passe sur l’image, hyper classique, des milliers de vélos à la sortie des usines et des bureaux.

Quelques années plus tard, ce sera Pékin, siège des Centrales d’Achat et la découverte émerveillée de la Cité Interdite et de la Grande Muraille. Beaucoup plus tard Shanghaï, mais ce sera pour la suite du récit.

Hong Kong

À l’époque, pas encore rattaché au Mainland ; Roure est représenté par un agent. Ultérieurement, nous mettrons en place une filiale.

Taïwan

Important marché de Joss sticks (bâtons d’encens – bâtonnets du culte). Je n’avals visité que Taïpei, ville pauvre et grise.

Notre agent était un excellent pianiste et j’ai retrouvé à Taïpei un «collègue» du 104 qui y était alors Nonce Pontifical.

Par contre, j’ai pu acquérir une connaissance parfaite de l’aéroport. Bâtiments très sommaires, confort modeste, charmante compagnie de souris. J’ai dû y passer 36 heures, l’avion en provenance d’Osaka qui devait m’amener à Colombo ayant été retardé par un typhon en Mer de Chine Orientale. Le régime de Taiwan était quasi dictatorial et très policier, Comme j’avais passé tes formalités d’Emigration (Police et Douane), aucune possibilité de ressortir en ville. J’étais «sous douane». Et pendant ce temps-là, Soeb Galely m’attendait au Sri Lanka.

Je recrute un Adjoint À la lecture des pages précédentes, vous devez vous dire: «Vaste programme». Et vous n’avez pas tort. Donc, en accord avec la Direction Générale, je vais m’employer à recruter un Adjoint commercial.

À l’occasion d’un voyage au Caire, notre Agent, N.Gannagé, également Agent de Rhône Poulenc, me signale, comme pouvant m’intéresser, l’Agent de Hoechst en Egypte, garçon qu’il a en grande estime: Nicola Cetto. Je prends donc contact avec N.Cetto. D’origine germano-belge, trilingue, Diplômé en Economie de l’Université de Cape Town, il a épousé une Strasbourgeoise. Il commence sa carrière chez Hoechst en Amérique du Sud, puis au Moyen-Orient. Nous nous mettons assez vite d’accord sur les conditions de son entrée chez Roure / Grasse. Les Cetto sont rentrés d’Egypte en minibus. Minibus qu’ils utilisent toujours pour leur première visite à Grasse, restée dans les Annales. En effet, Nicolas qui doit me rencontrer à l’usine, donne rendez-vous à son épouse ,Colette, devant la cathédrale de Grasse. Pour qui connaît l’étroitesse des rues de la vieille ville de Grasse, il s’agissait là d’un véritable exploit pour la conductrice. Mais le conducteur en titre du minibus n’était pas en reste. En effet, dans sa jeunesse, il avait traversé, avec un copain, l’Afrique, d’Alger à Cape Town en Coccinelle VW.

Nous connaissons plusieurs années de franche et amicale collaboration.
J’apprécie son «internationalisme» et sa persévérance, quelquefois proche de … 1′ entêtement.

D’abord en charge de l’Asie du Sud-Est, de l’Afrique et d’une partie du Moyen-Orient, il prend, au départ d’Hubert Bastide, la responsabilité .des «Arômes Alimentaires» où il montre beaucoup d’enthousiasme et d’énergie avec une Equipe très motivée. Malheureusement, nos Actionnaires suisses nous obligent à transférer l’activité «Arômes Alimentaires» à nos cousins de Givaudan (Prémices de la future fusion ?).

Nous sommes donc amenés à fermer ce Département et à nous séparer de toute l’Equipe. Nicolas va développer, à titre personnel, une activité commerciale de représentation entre l’Europe et l’Afrique du Sud à laquelle il est resté très attaché, jusqu’à, plus tard, et encore maintenant, y passer la moitié de l’année, l’autre moitié étant consacrée à la Côte d’Azur.

Nous sommes restés très liés.

Sa fille, Nathalie, après son diplôme de Pharmacie a intégré l’Ecole de Parfumerie de Grasse. Nous continuons à nous rencontrer régulièrement et nous avons été les visiter en Afrique du Sud. Merveilleux voyage!

En conclusion de ce chapitre «Activités commerciales Comment ne pas être impressionné par cet article de l’Express (28 Octobre – 2 Novembre 1974), montrant le jeune Directeur / Parfumeur, en pleine action, touche à sentir (ou mouillette) en mains.

«Louange de soi-même, couronne de merde» comme disait une de mes grand- mères.

 

Back To Top