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La prison : Nécessité et aberration

Depuis bien longtemps je suis mal à l’aise avec la notion de prison, voir nos semblables enfermés comme des animaux en cage me gêne. Pourtant cette notion de prison est aussi vieille que les sociétés. Déjà l’institution judiciaire et prison existaient dans l’Egypte des pharaons et sans doutes bien avant. Il semble que les principes même de la justice et des peines ait peu évolué (dans leurs principes de base) depuis ces époques anciennes. Le délit, le jugement et la sanction proportionnée sont leurs fondements depuis toujours.

Il me paraît souhaitable de s’interroger sur cette notion capitale.

La société se construit autour de certaines valeurs consensuelles définie par des institutions, et il est normal que ces sociétés défendent ces valeurs contre les actes délictueux ou criminels  qui pourraient les remettre en cause. Il en va de leurs cohérences et de leurs survies.

Le problème fondamental dans notre monde actuel est que les fonctions de la prison (oublions la notion de peine de mort qui n’est plus en vigueur chez nous) ne sont pas clairement définies, ni admises.

  • La prison peut être prise comme une fonction d’éloignement temporaire de la société d’individus dangereux ou perturbateurs. En ce sens elle joue pleinement son rôle, mais évidemment son caractère temporaire ne fait que repousser le problème puisque tôt ou tard ces individus seront réintégrés à la société et pourront perpétrer de nouveaux délits. La mesure d’éloignement n’est donc pas une fonction suffisante
  • La prison peut avoir une fonction de dissuasion en inspirant la crainte d’une sanction pénible et infamante. Malheureusement il semble que cet aspect dissuasif soit surtout ressenti par les « honnêtes gens ». Les délinquants agissant généralement soit par impulsions, soit avec un sentiment d’impunité, soit avec l’inconscience de commettre un délit. La fonction de dissuasion est loin d’être une panacée et en tout cas insuffisante par elle-même.
  • La prison peut avoir une notion de rédemption. Elle est symbolisée dans la phrase « j’ai payé ma dette à la société, je ne lui dois plus rien ». Si on peut dire que, après avoir purgé sa peine l’individu est quitte envers la société, on ne peut pas dire qu’il est quitte envers sa victime. Qu’un assassin est fait un ou dix ans de prison ne rendra pas son père assassiné à un enfant. Cette rédemption « institutionnelle » ne dédouane pas le délinquant de son acte. Le mal qui a été fait ne peut pas s’effacer et le délinquant le portera toute sa vie.
  • La prison pourrait avoir une fonction de réparation en dédommageant la victime du préjudice qui lui a été causé. Cette notion ne peut s’appliquer à un crime de sang car dans ce cas le dommage est irréparable. En cas de délit crapuleux la prison ne peut être une réparation, seul un dédommagement financier peut couvrir un dommage financier. Si la prison peut être envisagé comme une réparation vis à vis de la société, elle ne le sera jamais vis à vis de victimes. (Quant au dédommagement financier, vu la lenteur de la justice, il arrive trois ou quatre ans  après le dommage, donc bien trop tard  pour être une compensation efficace)
  • La prison peut avoir une fonction de réinsertion dans la société en « rééduquant » les délinquants pour « corriger » leurs penchants transgressifs et les re-sociabiliser correctement. Cette fonction pourrait éviter la récidive et la délinquance à répétition. Elle aurait l’avantage de renforcer les valeurs morales en vigueur.

 

Il est indispensable de hiérarchiser ces six fonctions pour définir une politique carcérale qui puisse fonctionner. Avant de donner des moyens pour la prison il me paraît fondamentale de se fixer des objectifs. Si les points 1, 2, 3 nécessitent des moyens pour l’encadrement des prisonnier (places de prisons, surveillants, sécurité) le point 5 réclame d’autres moyens plus orientés vers la pédagogie, la psychologie, la formation professionnelle sans doutes plus couteux mais pour un résultat plus définitif.

A ce stade faisons un point sur la notion de peine et de leur durée. Les points 1,2,3 s’accommodent assez bien de la notion de durée de peine comme nous la pratiquons aujourd’hui, par contre dans le cas de la ré-insertion(5) elle perd complètement de son sens. Le problème n’est plus de définir une durée de peine proportionnelle à la nature du délit commis, mais de pouvoir définir le moment à  partir duquel un délinquant peut être remis en liberté dans la société. On peut imaginer qu’un individu ayant commis un crime grave sous le coup d’une passion (rupture affective, divorce, …) pourrait être remis en liberté rapidement, une fois le choc émotionnel passé ou guéri, alors qu’au contraire un escroc calculateur et cupide serai plus long à réinsérer et resociabiliser. Ceci bouscule largement notre notion de la justice, de ses sanctions, et de l’évaluation de la gravité des délits.

On comprend mieux comment fixer des moyens à la justice c’est avant tout lui fixer des objectifs. Actuellement nous dansons sur deux pieds. Notre notion de gravité des délits, évaluation des peines nous conduit à préférer les notions d’éloignement, dissuasion, rédemption, mais dans le même temps nous souhaitons mener une politique de réinsétions qui n’est pas compatible. Résultat notre philosophie penche vers l’incarcération, alors que notre désir va vers la ré-insertion, la libération. Avant d’aller plus loin il serai sain de résoudre ce dilemme !

De même qu’avant de réformer notre justice (comme on le fait très régulièrement) on doit poser le problème de la prison qui est l’outil d’exécution de la justice. Comme toujours, pour ne pas choisir, on construit nos pyramides en commençant par le haut en pensant que l’on adaptera le bas au moment voulut … résultat rien ne tient debout.

Une dernière réflexion sur un des points qui me tracasse. Quand un individu commet un délit, on le juge souvent 2 à 3 ans après. Au moment du jugement on a dans le box l’individu tel qu’il est aujourd’hui que l’on juge pour ce qu’il était il y a 2 ou 3 ans. On juge un individu pour ce qu’il n’est sans doutes plus ! (on tourne le problème en disant que l’on ne juge pas l’homme mais son délit … c’est pourtant l’homme que l’on va emprisonner ). Il va être condamné à 5 ou 10 ans de prison. Il peut changer et n’être plus l’individu qu’il était il y a longtemps quand il a commis son délit. (D’où la très juste notion de libération anticipée). Ceci plaide pour la fonction de réinsertion de la prison et la notion, non pas de longueur de la peine, mais de la réinsertabilité du délinquant.

 

Vous avez sans doutes compris que mon cœur et mon esprit penchent pour la fonction de réinsertion qui à l’avantage de régler le problème à sa base et qui de plus n’exclus pas les fonctions de dissuasion, d’éloignement et de rédemption.

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